La nuit était glaciale, éclairée par une lune blanche et intense comme le faisceau lumineux d’un interrogatoire d’urgence et d’état. Un vent piquant agitait les arbres dénudés en sifflant entre les branches. D’autres bruits étaient perceptibles à distance, comme des craquements de bois sous le poids des bottes, et des bêtes en fuite.
Égarée dans cet univers hostile, envahie par la peur, j’avançais, ne sachant pas où j’allais, juste guidée par le bruit des vagues, et l’espoir des côtes. Les pas bottés semblaient se rapprocher, tandis que l’effroi montait. Soudain, j’aperçus une faible lueur rotative, un doux, très doux amer, des petits flashes comme des guides… Les bottes avaient du renoncer et rebrousser chemin, je ne les entendais plus. Le sourire me revint comme me revint la faim.
Je sortis de mon sac une part de far acheté au village. Et je repris la route, pas léger et bouche vorace. Le sort s’acharna sous la forme d’une vague grosse comme une réforme orthographique ! Dépitée, cheveux trempés, pruneaux inondés, je jetai mes reliefs, au vent et puis aux mouettes… ! Alors je vis voler les restes de mon far, dans la timide lumière du fare qui les avaient absorbés…
En perdant son PH, grec, certes, donc pas neutre, le fare avait aussi perdu un peu de sa lumière, et n’éclairait que faiblement l’écume colérique des tempêtes académiques qui détroussaient le far de ses pruneaux.